Sunday, February 16, 2014

Dallas Buyers Club, de Jean-Marc Vallée

Un cowboy qui vit pour l'alcool, le rodéo, les filles et l'argent facile, est diagnostiqué séropositif. Les médecins ne lui donnent plus qu'un mois à vivre, et ses anciens potes le cataloguent gay, catégorie hautement méprisable. Ron Woodroof achète alors illégalement un nouveau médicament proposé en test par l'hôpital à certains patients; des résultats désastreux sur son état de santé le poussent à chercher une autre solution, et il en fait un marché, puis un combat.


L'histoire, vraie, est superbe. C'est le retournement radical d'un homme. Ron est un macho pur et dur: moustache, Stetson, pistolet, vaches et filles. Matthew McConaughey l'incarne radicalement texan, un type fermé, coincé dans son arène et sans désir d'aller voir ailleurs. Sa virilité est aussi une de ses caractéristiques; être séropositif le balance soudainement dans un autre monde, qu'il méprisait, de loin, sans le fréquenter. Ron continue à s'en protéger, même malade. Et il n'approche de ce nouveau monde que parce qu'il pense en faire son profit, en tirer de l'argent en exploitant ceux à qui il est sûr d'être supérieur: des homosexuels, mourants et désespérés en plus.


Si le changement qui s'opère en Ron est impressionant, il reste tout du long crédible, car chaque petit pas en avant est opéré de manière progressive et logique. L'amitié qui grandit entre lui et un homo aussi mal en point que lui, Rayon/Raymond, est particulièrement touchante. Je crois beaucoup moins à son costume d'homme d'affaires sans profit, lunettes sur le nez, défendeur du droit à la médicamentation choisie. L'histoire est vraie, certes, mais on est au cinéma. Ron est montré comme le vilain, devenu gentil; mais ses "recherches" sont aussi peu crédibles que celles des industries pharmaceutiques, et il utilise lui aussi des cobayes humains pour les valider; il a simplement pour lui qu'il fait aussi partie de ces cobayes. Ajouter un personnage de médecin fadasse (pauvre Jennifer Garner, qui n'a pas mérité ce rôle) aux côtés de Ron ne le crédibilise pas.


La mise en scène n'aurait pas du non plus en rajouter dans les effets épileptiques, afin d'appuyer son personnage, dont le récit est suffisamment puissant en lui-même. La réalisation pop de Jean-Marc Vallée correspondait à merveille à son C.R.A.Z.Y. sorti en 2006, le récit d'un jeune homo des années 60 aux années 80. Rien ne justifie les passages clippés de Dallas Buyers Club, les images presques subliminales et les séquences inter-cutées à outrance. Une scène est caractéristique de ces effets faciles: Ron voit de la lumière clignoter et rentre dans une pièce emplie de papillons de nuit, qui viennent se poser sur lui, alors que la lumière stroboscopique rappelle celle d'une boite...


La performance de Matthew McConaughey reste impeccable, tout comme celle de Jared Leto à ses côtés. Le surplus de mise en scène ne gâche pas non plus un récit prenant.


Dallas Buyers Club
de Jean-Marc Vallée
avec: Matthew McConaughey, Jared Leto, Jennifer Garner,...
sortie française: 29 janvier 2014

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